Budget, santé et éducation
Rédacteur initial: Gilbert Paquette
Extension de: Forger notre avenir/Emploi et revenu de citoyenneté
Blocages canadiens
Le déséquilibre fiscal entre les deux paliers de gouvernement, les dédoublements de juridictions et la dispersion de nos pouvoirs collectifs entre Ottawa et Québec sont des obstacles majeurs pour assurer une utilisation des fonds publics en fonction des valeurs, des besoins et des projets prioritaires des Québécoises et des Québécois, au premier chef en éducation et en santé, mais aussi dans tous les secteurs de la vie collective. Ottawa a trop de revenus par rapport à ses responsabilités prévues par la constitution alors que le Québec a une marge de manœuvre réduite compte tenu des couts croissants en santé, éducation et aide sociale. C’est ce qu’on appelle le « déséquilibre fiscal » que le régime fédéral est incapable de corriger malgré tous les palabres sur le sujet. En 2014-2015, 61% des dépenses d’Ottawa étaient constitués de transferts aux provinces. Avec ses surplus (son « pouvoir » de dépenser) Ottawa peut investir directement dans les champs de compétence du Québec ou effectuer des transferts au Québec en décidant unilatéralement du sujet, du niveau des fonds et en posant unilatéralement ses conditions. Il peut aussi utiliser les taxes et impôts des Québécoises et des Québécois dans tous domaine de son choix sans tenir compte des priorités du Québec ou en dédoublant les programmes de l’État du Québec.
Les décisions unilatérales de réduction des transferts fédéraux sont le principal facteur de déstabilisation des finances publiques au Québec depuis le milieu des années 90. En santé, le nouveau gouvernement Trudeau maintient la décision du gouvernement Harper de plafonner l’augmentation des dépenses de transferts en santé à 3%, alors qu’historiquement les coûts augmentent de 6% par année. En éducation post secondaire, le manque à gagner des universités augmente depuis les coupes des années 98-99, ce qui a créé une pression pour l’augmentation des frais de scolarités menant à la crise de 2012. Les restrictions de l’accès à l’assurance emploi décrétées par Ottawa frappent plus durement le Québec et ont un impact direct sur la hausse à Québec du budget de l’aide sociale. Pendant ce temps, Ottawa maintient un niveau élevé ses dépenses militaires, ce qui devrait couter aux contribuables québécois 4,5 milliards par année pour les prochaines 20 années. Pour les subventions pétrolières, certains estimés parlent de dépenses de 2 milliards par année. La vente à perte des actions de GM et les autres cadeaux à l’industrie automobile ontarienne ont été payés à 20% par les taxes du Québec Dans les dépenses d’Ottawa dans le volet infrastructures provinciales-territoriales, le Québec reçoit 18,4% des fonds, moins que sa part de la population (23,1%) ou de contribution fiscales à l’État canadien (19,3 %)
Récupération de nos budgets
Le mythe de la dépendance du Québec à l’égard des transferts d’Ottawa est contredit par les chiffres. Biens sûr, dans les transferts de péréquation, le Québec est la province qui reçoit le plus en chiffres absolus, mais aussi le moins par habitant (sauf l’Ontario). Mais si on regarde l’ensemble des budgets, on constate que l’ensemble des transferts d’Ottawa au Québec (25,6%), est plus que compensé par le fait que seulement 17,9% des dépenses des programmes fédéraux bénéficient au Québec, soit beaucoup moins que la contribution du Québec (19,3 %) au budget d’Ottawa. Ce résultat de l’étude de Maxime Duchesne va dans le même sens que les études précédentes récentes tenant compte de l’élimination des chevauchements.
En récupérant la totalité des quelques 50 milliards (48, 8 milliards en 2013-2014) des taxes et impôts qu’il envoie à Ottawa, le Québec pourrait non seulement assumer toutes les dépenses d’Ottawa au Québec, mais surtout réorganiser les dépenses publiques d’une façon cohérente, en fonction de la structure de son économie et de sa culture et ses valeurs de solidarité sociale. Sur le strict plan budgétaire, il est urgent d’accéder à l’indépendance le plus rapidement possible, de regrouper nos deux moitiés de budget, de mettre fin à notre dépendance fiscale, et par conséquent politique, pour construire une société qui nous ressemble.
Réorganisation budgétaire dans le Québec indépendants
Un projet de réorganisation des budgets publics du Québec indépendant, comprendra notamment la mise en œuvre des orientations suivantes :
Consolider le budget public de l’État québécois
1. Mettre fin au déséquilibre fiscal et au pouvoir de dépenser d’Ottawa au Québec, en récupérant toutes les taxes et les impôts du Québec à Ottawa et en les intégrant à un budget consolidé de près de 120 milliards $ de la République du Québec.
2. Assumer dans ce budget du Québec toutes les dépenses actuelles de transfert d’Ottawa au Québec, notamment les pensions de vieillesse, l’assurance chômage, et les autres transferts aux personnes, dans la perspective de leur intégration partielle ou totale au revenu de base universel (RBU, voir section 2.5).
3. Limiter l’importance du service de la dette du Québec indépendant par rapport à la dette consolidée des deux niveaux de gouvernement, en établissant, lors des discussions sur le partage des actifs et des passifs, notre part de la dette fédérale à un niveau tenant compte de l’historique des relations fiscales entre le Québec et le Canada, compte tenu que les actifs canadiens au Québec ne représentent que 14,3 % du total canadien.
Réorienter l’utilisation des fonds publics au Québec
4. Réorganiser le budget consolidé de l’État indépendant du Québec pour favoriser la réalisation de vastes projets faisant consensus dans la population priorisés en fonction de nos valeurs et de nos besoins (voir les autres sections).
5. Dégager une marge de manœuvre de plusieurs milliards de dollars dans le budget public du Québec indépendant par la réduction des dépenses militaires pour les ramener au niveau d’une force de protection civile, par l’élimination de la part actuelle du Québec dans les subventions à l’extraction des hydrocarbures au Canada, ainsi que par l’élimination des chevauchements, dans le régime actuel, entre les programmes et les ministères des deux paliers de gouvernement.
6. Augmenter la marge de manœuvre dans le budget public l’augmentation des revenus: réintroduction de la taxe sur le capital pour les institutions financières, d’un impôt sur le capital en dormance des entreprises, d’un impôt minimum pour les très hauts revenus, par la création de nouveaux paliers d’imposition chez les hauts revenus et par une lutte sans merci à l’évasion fiscale.
Réinvestir dans l’Éducation nationale
7. Établir la gratuité scolaire dans l’enseignement supérieur et assurer un revenu de base adéquat aux étudiantes et aux étudiants, tout en rétablissant les budgets réguliers des universités pour contrer les coupures effectuées depuis 98-99 par Ottawa.
8. Investir dans un programme ambitieux contre le décrochage scolaire dans l’enseignement primaire et secondaire ; entreprendre un vaste projet d’investissement dans les bâtiments, les technologies d’information et les bibliothèques scolaires et fournir gratuitement un matériel scolaire et des ressources informationnelles de qualité aux familles défavorisées.
9. Compléter le réseau des CPE, en utilisant notamment l’allocation récupérée d’Ottawa pour la garde d’enfant, pour atteindre l’objectif d’un enfant une place tout en préservant un tarif universel.
Réinvestir dans la santé et le sport
10. Augmenter le budget public en santé en fonction des besoins et du vieillissement de la population plutôt qu’indexés au cout de la vie comme le prévoit Ottawa et stopper la privatisation de notre système de santé public.
11. Améliorer l’efficacité de notre système de santé en donnant accès à un médecin de famille à tous, en réduisant le temps d’attente aux urgences, en encourageant le maintient à domicile des ainés et en investissant dans les équipements et les processus de santé innovateurs.
12. Assurer la pérennité des CLSC sur l’ensemble de notre territoire avec un financement indépendant et stable dans le temps ; ouvrir les CLSC sept jours sur sept et 24 heures sur 24 et y intégrer des cliniques d’infirmières.
13. Regrouper les régimes privés d’assurance médicaments avec le régime public afin de créer un seul régime d’assurance universel, générant des économies estimées à environ trois milliards $ ; accélérer l’autorisation des médicaments génériques et mettre en place des revues de médication afin, entre autres, d’éliminer les médicaments superflus, de diminuer les interactions médicamenteuses et de vérifier la bonne utilisation des médicaments.
14. Adopter une politique nationale du sport pour encourager la prévention par de saines habitudes de vie tant pour l’alimentation que pour l’activité physique ; mettre en place Équipe Québec et financer l’inscription du Québec dans toutes les compétitions sportives mondiales où le Québec excelle, en utilisant la part que le Québec envoie au Canada pour soutenir les athlètes québécois.